Législations des pays d'Europe - Note de synthèse

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NOTE DE SYNTHESE

Dans la perspective de la prochaine réforme de la législation française relative à la chasse, on a examiné les législations étrangères correspondantes.

L'Allemagne, l'Angleterre et le Pays de Galles, l'Espagne, l'Italie, le Portugal et la Suisse, qui sont les pays européens les plus importants eu égard au nombre de chasseurs, ont été retenus. La législation des Pays-Bas a également été étudiée, parce qu'elle a été modifiée récemment.

En Allemagne, en Italie et en Suisse, la chasse relève de la compétence régionale. Néanmoins, lorsqu'ils légifèrent sur la chasse, les Länder allemands, les régions italiennes et les cantons suisses ont l'obligation de respecter les principes posés par la loi nationale, qui constitue une loi-cadre. Pour chacun de ces trois pays, on a donc analysé, d'une part, les règles nationales et, d'autre part, celles qui s'appliquent dans une région qui a été choisie à titre d'exemple. On a procédé de la même façon pour l'Espagne, mais pour une raison différente. En effet, en Espagne, la chasse fait partie des compétences qui peuvent être transférées aux communautés autonomes, sans que ces dernières soient tenues de suivre les prescriptions arrêtées au niveau national. Cependant, il apparaît que les dix communautés autonomes qui ont adopté leur propre loi sur la chasse se sont référées à la loi nationale de 1970, antérieure à la Constitution. De plus, les sept communautés autonomes qui n'ont pas adopté leur propre loi sur la chasse continuent d'appliquer la loi nationale.

Par ailleurs, les Pays-Bas et le Portugal ont récemment modifié leur loi sur la chasse. Les Pays-Bas l'ont fait en 1998, mais la nouvelle loi, très restrictive puisqu'elle limite à six le nombre d'espèces susceptibles d'être chassées, n'est pas encore entrée en vigueur, faute des règlements d'application nécessaires. Elle devrait se substituer à l'ancienne au début de l'année 2001. La nouvelle loi laisse aux autorités provinciales le soin de régler de nombreuses questions. Le Portugal a également adopté une nouvelle loi sur la chasse en 1999. Celle-ci n'entrera en vigueur qu'en septembre 2000. S'agissant de ces deux pays, on a donc étudié la législation encore en vigueur, ainsi que celle qui devrait y entrer prochainement.

Pour chacun des pays retenus, on a analysé les dispositions régissant les territoires de chasse, les périodes de chasse et le permis de chasser. Le seul mode de chasse pris en compte est la chasse à tir, c'est-à-dire au moyen d'une arme à feu.

Dans la présente note, on a choisi de mettre en évidence trois points traités par le rapport Patriat et repris dans le projet de loi :

- les relations entre le droit de chasse et le droit de propriété, et plus particulièrement la reconnaissance au propriétaire d'un droit d'opposition à l'exercice de la chasse ;

- l'existence de jours de la semaine où la chasse est interdite ;

- le renforcement de la sécurité grâce aux dispositions relatives au permis de chasser.

I - DANS TOUS LES PAYS ETUDIES, LES RELATIONS ENTRE DROIT DE CHASSE ET DROIT DE PROPRIETE SONT COMPLEXES

1) Quatre pays accordent le droit de chasse au propriétaire, mais avec des conséquences diverses pour ce dernier

a) Dans ces pays, l'exercice du droit de chasse par le propriétaire est toujours subordonné à la détention d'une superficie minimale

Le droit de chasse appartient au propriétaire en Allemagne, en Angleterre et au Pays de Galles, en Espagne et aux Pays-Bas. Toutefois, dans chacun de ces pays, le propriétaire ne peut exercer le droit de chasse que s'il détient une superficie minimale.

Celle-ci est fixée à 75 hectares par la loi fédérale allemande, les Länder ayant la possibilité de choisir un seuil plus élevé. En Angleterre et au Pays de Galles, l'exercice du droit de chasse est subordonné à la détention d'un terrain " suffisamment grand ", sans qu'aucun texte ne fixe de valeur. Aux Pays-Bas, la surface minimale permettant l'exercice du droit de chasse est de 40 hectares.

En Espagne, le seuil permettant au propriétaire l'exercice du droit de chasse varie selon les communautés autonomes et selon la chasse pratiquée. Ainsi, la loi nationale, qui continue à s'appliquer dans les sept communautés qui n'ont pas légiféré sur la chasse, le fixe à 250 hectares pour la chasse au petit gibier et à 500 hectares pour la chasse au gros gibier. Les communautés autonomes qui disposent de leur propre loi sur la chasse n'ont pas nécessairement retenu ces limites : l'Aragon les a respectivement fixées à 500 et 1000 hectares, tandis que la Galice a retenu une seule valeur, 2000 hectares, quelle que soit la chasse pratiquée. Ces limites n'ont pas le même caractère impératif que dans les autres pays, car la loi nationale et les lois des différentes communautés prévoient que plusieurs propriétaires dont les terres sont contiguës puissent se regrouper pour former un territoire de chasse d'une taille suffisante. Dans ce cas, la loi nationale exige des superficies minimales doubles de celles requises pour la constitution des terrains de chasse individuels.

b) En principe, le propriétaire a la possibilité de s'opposer à ce qu'autrui chasse sur ses terres

Dans les pays où le droit de chasse appartient au propriétaire, ce dernier peut décider de transformer ses terres en réserve sur laquelle la chasse est interdite.

Cependant, en Espagne, le propriétaire qui ne souhaite pas que l'on chasse sur ses terres doit les clôturer pour qu'elles ne soient pas considérées comme faisant partie d'un terrain de chasse banal. De plus, dans certaines communautés autonomes, la procédure de reconnaissance administrative des zones de chasse autres que banales permet que des terres enclavées soient incluses dans ces zones sans l'accord du propriétaire.

En Allemagne, dans la mesure où leurs terres ne sont pas exclues du territoire cynégétique, les propriétaires de terrains d'une superficie inférieure au seuil leur permettant d'exercer le droit de chasse sont automatiquement membres de l'association communale des titulaires du droit de chasse, à laquelle ils transfèrent leur droit et qui l'administre pour eux. Ils ne peuvent donc ni chasser sur leurs terres ni empêcher qu'autrui y chasse. Toutefois, les lois sur la chasse de presque tous les Länder ont prévu une procédure administrative permettant aux propriétaires de faire reconnaître l'interdiction de la chasse sur leurs terres.



2) Dans les trois autres pays, le droit de chasse appartient à l'Etat, avec des conséquences également diverses pour les propriétaires

a) Sauf dans le canton de Genève, l'Etat transfère aux particuliers l'exercice du droit de chasse

En Italie et au Portugal le droit de chasse appartient à l'Etat. En Suisse, il appartient aux cantons. Si l'on excepte le canton de Genève, qui exerce lui-même le droit de chasse en interdisant la chasse sur son territoire et en confiant à des gardes-chasse le soin de veiller à l'équilibre des espèces animales, dans chacun de ces trois pays, les particuliers peuvent chasser, car l'Etat leur transfère l'exercice du droit de chasse, selon des modalités variables.

En Suisse, quelques cantons ont opté pour le système de l'affermage. Ils louent donc leur droit de chasse, tandis que les autres cantons permettent l'exercice de la chasse à tous les particuliers qui satisfont aux critères fixés par la loi (c'est-à-dire essentiellement aux détenteurs du permis). Il en va de même en Italie, où l'Etat accorde le droit de chasser à tous les particuliers qui en font la demande et qui satisfont aux critères fixés par la loi sur la chasse.

Au Portugal, à quelques exceptions près (agglomérations, jardins...), la chasse peut être exercée sur tout le territoire. Ce territoire cynégétique se subdivise, d'une part, en terrains de chasse explicitement reconnus comme tels à l'issue d'une procédure administrative ad hoc et, d'autre part, en terrains de chasse banaux. Il existe plusieurs catégories de terrains de chasse reconnus : sur certains, l'Etat exploite directement le droit de chasse et, sur d'autres, il le concède à des personnes de droit privé.

b) La détention du droit de chasse par l'Etat n'empêche pas nécessairement les propriétaires de s'opposer à ce que l'on chasse sur leurs terres

En Suisse, les propriétaires n'ont actuellement aucune possibilité de s'opposer à ce que l'on chasse sur leurs terres. Il en va de même au Portugal, car personne ne peut s'opposer à ce que l'on chasse sur les terrains banaux.

En revanche, la nouvelle loi portugaise reconnaît aux propriétaires le droit de s'opposer à ce que l'on chasse sur leurs terres. De même, la loi italienne a prévu une procédure permettant aux propriétaires de demander que leurs terrains soient exclus des zones de chasse.

II - LA PLUPART DES PAYS ETUDIES ONT INSTAURE UN OU PLUSIEURS JOURS HEBDOMADAIRES DE NON-CHASSE

L'Allemagne est la seule à ne pas l'avoir fait. En revanche, les lois anglaise, italienne, néerlandaise et portugaise ont institué un ou plusieurs jours de non-chasse. Il en va de même des lois de plusieurs communautés autonomes espagnoles, ainsi que du canton de Neuchâtel.

Le Game Act
, qui régit la chasse au lièvre, au faisan, à la perdrix, au tétras, au petit coq de bruyère et aux autres espèces de gibier de lande et de bruyère en Angleterre et au Pays de Galles, interdit l'exercice de la chasse pour ces espèces le dimanche. De plus, dans certains comtés, des arrêtés interdisent toute chasse le dimanche. La chasse est également interdite le dimanche aux Pays-Bas. En Italie, la loi nationale interdit l'exercice de la chasse le mardi et le vendredi, et limite le nombre hebdomadaire de jours de chasse à trois, en général librement choisis par le chasseur. Cependant, certaines régions imposent ces trois jours. Au Portugal, la législation actuellement en vigueur limite l'exercice de la chasse au jeudi et au dimanche, tandis que la nouvelle loi laisse à un règlement le soin de déterminer les dispositions applicables.

En Espagne et en Suisse, la loi nationale ne comporte aucune restriction relative à l'exercice de la chasse certains jours de la semaine, mais les règles locales peuvent en comporter. Ainsi, la communauté de Madrid réserve au jeudi, au samedi et au dimanche l'exercice de la chasse au petit gibier, et le canton de Neuchâtel interdit toute chasse le dimanche, le mardi et le vendredi.

III - CERTAINES DISPOSITIONS RELATIVES AU PERMIS DE CHASSER PERMETTENT DE RENFORCER LA SECURITE

Par permis de chasser, on entend l'ensemble des conditions requises d'une personne pour qu'elle puisse chasser. Dans presque tous les pays étudiés, le permis de chasser suppose non seulement que l'intéressé réussisse un examen, mais également qu'il remplisse d'autres conditions (santé, assurance...).

Les dispositions relatives au permis de chasser et qui permettent de renforcer la sécurité sont très variables d'un pays à l'autre. Ainsi, l'Allemagne conditionne la location d'un droit de chasse à la détention du permis de chasser depuis au moins trois ans.

En Angleterre et au Pays de Galles, la délivrance du permis de chasser ne dépend pas de la réussite d'un examen, puisque ce document s'achète dans les bureaux de poste. En revanche, les chasseurs doivent obligatoirement être en possession d'un permis de port d'armes de chasse. Or, ce permis est délivré par la police, pour une durée limitée et de façon très restrictive. Le demandeur doit notamment être parrainé par un tiers (parlementaire, médecin, juriste...) qui le connaît personnellement.

En Espagne, les chasseurs doivent également solliciter un permis de port d'armes, dont la durée de validité est limitée à trois ou cinq ans selon la nature de l'arme de chasse. De plus, le renouvellement de ce permis suppose que l'intéressé apporte la preuve de ses capacités psycho-physiques et fournisse un extrait de casier judiciaire.

En Italie, la première délivrance du permis de chasser comme son renouvellement sont subordonnés à la présentation d'un certificat médical. Par ailleurs, certaines infractions à la loi sur la chasse entraînent l'annulation du permis de chasser, et donc l'obligation de repasser l'examen correspondant. En cas de récidive relative aux plus graves des infractions pénales définies par la loi sur la chasse, le retrait du permis de chasser peut même être définitif.

Au Portugal, la carte de chasseur a une durée de validité limitée et variable en fonction de l'âge auquel l'intéressé a réussi l'examen : elle est valable dix ans si l'intéressé a moins de cinquante ans au moment où il l'obtient et cinq ans sinon, et son renouvellement est subordonné à la présentation d'un certificat médical. De plus, la délivrance et le renouvellement du permis d'utilisation et de port d'armes de chasse sont subordonnés au passage d'un examen médical.

Dans le canton de Neuchâtel, le renouvellement de l'autorisation annuelle de chasser suppose que l'intéressé ait participé à au moins un tir d'entraînement organisé par la Fédération des chasseurs neuchâtelois. En outre, lorsque le permis de chasser a été retiré pendant une période d'au moins cinq ans, l'intéressé a l'obligation de repasser l'examen de chasse pour pouvoir à nouveau chasser.

Par ailleurs, plusieurs pays ont adopté des dispositions comparables au permis de chasse " accompagné ", que le projet de loi actuellement soumis au Parlement propose d'introduire en France. En Allemagne, le permis spécifique que peuvent obtenir les jeunes à partir de l'âge de seize ans ne leur permet de chasser que s'ils sont accompagnés d'un adulte expérimenté. Dans la communauté autonome de Castille-La Manche, les mineurs, qui peuvent obtenir le permis de chasser à partir de l'âge de quatorze ans, doivent être accompagnés d'une personne majeure s'ils souhaitent chasser avec une arme. Aux Pays-Bas, où la délivrance du permis de chasser est réservée aux personnes majeures, les mineurs ont la possibilité de chasser sans permis, dans la mesure où ils sont accompagnés d'un adulte détenteur du permis.

Par ailleurs, en Italie, où la délivrance du permis de chasser est également réservée aux personnes majeures, les nouveaux détenteurs du permis de chasser ne peuvent, pendant les douze premiers mois de détention du permis, chasser que s'ils sont accompagnés d'un chasseur titulaire du permis de chasser depuis au moins trois ans.

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