L'arrêt - Appartion, déclenchement, évolution

Publié dans La chasse

Index de l'article

Apparition - Déclenchement - Evolution de l'arrêt

Chiot à l'arrêt sur plumeVers l’âge de 5 à 6 semaines, le chien manifeste la possibilité de prendre des poses d’arrêt sur des objets mouvants ou inhabituels de son environnement.
Selon Jean -Marie PILARD : “ Tous les chiots de grande origine arrêtent dès l’âge de six semaines, plus ou moins, mais tous le font.”
On peut penser que ces première poses d’arrêt sont déclenchées plus par la vue que par le sens olfactif. Le chiot pourra arrêter, grâce à sa puissance olfactive, entre 4 et 6 mois.
Au départ, le chiot est arrêté par le gibier : il a des difficultés à comprendre et analyser le message olfactif reçu ; cela est confirmé par une position d’arrêt que l’on peut qualifier d’incomplète ; l’animal est “mou”, sans style ; il localise mal ; il est surpris. C’est un fait, les premiers arrêts du chien, dans la grande majorité des cas, ne sont pas dans le style de la race ; l’animal semble interpellé, étonné ; il capte une émanation dont il ne connaît pas l’origine. Il reste figé, sans tension ; il semble réfléchir. On dit que le chiot est arrêté par le gibier.

La précocité de l’arrêt peut varier suivant le type de gibier. Selon les dresseurs, la précocité de l’arrêt varierait en fonction du sexe et de la race. Les femelles arrêtent plus précocement, ainsi que les races dites continentales.
À l’âge de 12 mois, le chien doit arrêter ; certains individus ne se déclarent que vers 3 ou 4 ans, et parfois sur un seul type de gibier.
Rapidement, après quelques rencontres, l’arrêt va s’affirmer ; l’animal se tend et prend bientôt la pose d’arrêt dans le style de la race.
Au début, il faut le laisser jusqu’à ce que le gibier se mette seul à l’envol ; puis, il inspectera et reniflera la place, après avoir poursuivi le gibier. Lorsque l’arrêt est acquis, il faut obliger le chien à ne pas bouger à l’envol ; certains recommandent de passer devant le chien pour faire voler le gibier.
Au départ, quand le chien arrête, il faut le laisser tranquille, le faire profiter de l’émanation ; il s’initiera à la fermeté de l’arrêt.
L’arrêt est quelque chose de tangible qu’on peut évaluer et dont on a augmenté la durée au cours du temps.Un bon chien, surtout en montagne, est capable de rester en arrêt ( on dit “tenir l’arrêt”) plusieurs minutes, parfois près d’une demi-heure, en attendant que son maître arrive à le rejoindre.L’arrêt doit être tenu plus ou moins longtemps par le chien.
Wiliam ARKWIGHT précise : “ quelques chiens s’impatientent après avoir tenu l’arrêt pendant un temps raisonnable et s’élancent sur le gibier ; d’autres tiennent l’arrêt plus de dix minutes.”Le Colonel HUTCHINSON raconte qu’un chien resta en arrêt dans un champ pendant que les chasseurs étaient allés déjeuner dans une maison voisine.
L’arrêt doit être ferme et parfaitement tenu jusqu’à l’ordre du conducteur, comme le définit si bien Jean-Marie RINGEVAL : “ D’abord, j’ai impérieusement besoin d’un arrêt ferme, prolongé, impeccable, susceptible de durer tout le temps que prendra le déplacement du tueur. Durée de temps variable, souvent imprévisible, et sans aucun rapport avec l’éloignement éventuel du maître à la seconde de pétrification du chien.”
L’arrêt nécessite une grande sélectivité olfactive, de l’initiative, entraînant un acte net et précis. Avec l’expérience, le chien ayant capté l’émanation va la remonter plus ou moins vite, on dit avec plus ou moins de décision. Il doit obliger le gibier à se figer, s’immobiliser, pour permettre au conducteur d’arriver, de se placer, et d’essayer de capturer l’oiseau.
Pour le chasseur, l’arrêt doit davantage correspondre à une domination qu’à une indication.
Les chiens d’arrêt qui font la différence sont ceux qui dominent par rapport à ceux qui indiquent. “Les grands setters vont à la viande ; c’est souvent cette audace qui distinguera un grand chien d’un excellent chien d’arrêt.”
Le chien n’arrête pas tous les gibiers avec la même passion, correction, régularité. Certains chiens manifestent plus ou moins de précocité pour certains gibiers.Avec l’entraînement, et surtout de très nombreuses mises en présence, l’arrêt s’affermit, se stylise.
On peut penser qu’à ce moment, le système olfactif atteint sa maturité. Certains chiens, au sommet de leur art par des attitudes d’arrêt particulières, vous permettent d’imaginer l’oiseau, de prévoir son départ, d’en situer la position exacte.
Actuellement, rien ne permet de mesurer de manière fiable la puissance olfactive chez le chien, donc encore moins d’évaluer les variations de la puissance olfactive en fonction d’états physiologiques, climatiques, pathologiques, etc. . .
On est certain qu’un entraînement à la détection de certaines odeurs affine et éduque le flair du chien : on dit que l’on créance le chien (recherche de la drogue, mise en présence sur un même type de gibier).

Il y a quelques années, j’avais rapporté d’un voyage aux U.S.A. des “flacons d’odeurs” (gélinottes, raton-laveur, ours), gibiers totalement inconnus de mes chiennes.
J’ai eu l’occasion d’en inhiber différents objets, et j’ai constaté qu’après plusieurs présentations, certains chiens prenaient rapidement une pose d’arrêt sur l’ours, la gélinotte, le raton-laveur, et cela d’autant plus rapidement que je dispersais ces “parfums” sur des gibiers morts et congelés : faisans, perdreaux.
Les veneurs l’ont constaté depuis longtemps : on peut créancer le chien sur des scents spécifiques et particuliers.
Le chien perçoit toutes les odeurs avec une plus ou moins grande sensibilité, mais l’entraînement peut le stimuler sur un seul type d’odeur.
L’arrêt peut varier dans sa fermeté, suivant les conditions de terrain, comme le rappelle le colonel DEMANGET : “Le marais rend l’arrêt moins ferme et le bois le rend plus court. Il peut même arriver à le supprimer tout à fait ; le chien nasille, chasse comme un cocker et se tape, même à bon vent.”
Il y a indiscutablement une éducation de l’odorat ; cependant, tous les chiens n’auront jamais la même finesse ni la même puissance olfactive.
Le chien quête puis localise l’oiseau en remontant les différentes émanations faites des molécules odorantes dégagées par l’oiseau ou par ses traces.
Le chien va pouvoir localiser l’oiseau avec grande précision lorsqu’il va capter l’émanation directe ou “scent” émise par ce dernier.

L’oiseau (ou prédaté) adopte, en fonction des circonstances, un comportement varié, qui n’est pas standard.
On distingue plusieurs phases comportementales susceptibles d'être utilisées par l'oiseau, afin d'échapper au prédateur (ici, le chien).
Ces phases comportementales peuvent être dictées par le terrain, l'âge et les habitudes de l'oiseau, la pression de chasse, la qualité du chien dans sa méthode de quête et dans ses arrêts.
On peut distinguer deux phases comportementales adoptées par le prédaté face au prédateur :
Première phase.

L’oiseau (prédaté) s’immobilise, écoute, regarde, observe le chien (prédateur). Si cela est possible, il le situe par rapport au milieu afin de prévenir sa fuite.
À ce moment, le chien a repéré le gibier en captant l’émanation directe, après résolution plus ou moins facile du labyrinthe olfactif laissé par les voies de contact et aériennes.
Deuxième phase.

Cette phase se déroule suivant des modalités différentes :
À ce moment, le chien est en arrêt, en état d'immobilité tonique ; il profite de l'émanation directe : il "boit" l'émanation. Certains disent qu'il "pipe".

Quant à l'oiseau, afin de se sauver la vie, il peut choisir entre différentes possibilités.
Cas de la fuite.

Première technique
: Envol brutal.
C'est la fuite brutale de l'oiseau (ou prédaté), qui laisse peu de temps au chien (ou prédateur) pour le localiser avec précision. Il y a envol brutal, presque simultané à l'arrêt. C'est souvent le cas d'oiseaux soumis à une forte pression de chasse.
Cette fuite entraîne l'émission de fèces, signe d'un sentiment de peur. Si l'envol n'est pas repéré par le prédateur, ces fientes serviront de leurre : elles occuperont le chien (ou prédateur), ce qui retardera d'autant la poursuite.
Cet artifice ne marche pas ou moins bien avec des chiens routinés. On dit des chiens de métier.

Deuxième technique : Coulé de fuite.
L'oiseau (ou prédaté) piète pour distancer son poursuivant, et cela lui permet de savoir si le chien (ou prédateur) a repris sa quête pour le pister. S'il est convaincu d'être filé, l'oiseau se met à l'essor.
En fait, ce déplacement ou coulé de fuite est fait pour perturber le chien (ou prédateur). À ce moment, les émanations émises varient du fait des réactions physiologiques de l'oiseau, correspondant à la baisse des sécrétions glandulaires, suite à une vaso-constriction de certains vaisseaux, résultat du stress.
Pour fuir, l'oiseau va multiplier les obstacles, fuir à vent contraire, tout cela ayant pour but de rendre plus difficile le contrôle de l'émanation et des voies de contact et aérienne.

Troisième technique : Cas de l’immobilité.
L’oiseau adapte une position d’immobilité et utilise à l’occasion son plumage cryptique afin de rendre le repérage plus difficile.
Souvent, dans cette situation, l’oiseau (prédaté) présente un comportement proche de l’hypnose, avec une inhibition partielle des contrôles volontaires ; il semble engourdi, mais conserverait une certaine attention et ses perceptions sensorielles. Mais, en quelques secondes, il peut retrouver son comportement habituel. Il passe d’un état de panique à un état de réflexion. L’oiseau, en cet instant, donne l’impression qu’il est plongé dans un profond sommeil ou même qu’il est mort. Il y a absence totale de molécules odorantes par annulation des sécrétions glandulaires. La fin de cet état est brutal ; l’animal se redresse et essaie de s’échapper le plus rapidement possible.Cette forme de défense du prédaté a été signalée par différents auteurs, dont le Dr. Emile BOURDON :“ Je me demande souvent lequel fascine l’autre. Je crois vraiment qu’ils sont attirés, séduits l’un par l’autre.
Disons plutôt qu’un charme, un attrait, une séduction, un éblouissement, existent ou passent entre le chien et l’oiseau. Peut-on parler d’hypnotisme ? ou de magnétisme ? Admettons plutôt un envoûtement, un grand trouble, un enchantement.”

Selon J-M. PILARD, pendant la phase d’arrêt ,“ le chien s’hypnotisera”.

Actuellement, lorsque l’on évoque l’arrêt, le terme d’hypnose est remplacé par “immobilité tonique”.

On peut se poser la question ; Quel est l'intérêt, pour le prédaté, d'adopter cet état d'immobilité tonique ?
DARWIN pensait que cette hypnose ou immobilité tonique représentait une forme d’imitation de la mort et qu’elle pouvait avoir valeur de survie. Certains prédateurs refusent de s’intéresser à une proie morte et à la manger.
Les réactions hypnotiques ne sont pas apprises.
Lors d’immobilité tonique, en dépit de leur immobilité physique et de l’absence de réflexe, les animaux sont capables de contrôler l’environnement.
Il y a une sorte d'engourdissement de la conscience, ce qui permettrait une certaine forme d'attention et une conservation relative des perceptions sensorielles.
Tout sujet hypnotisé, puis abandonné à lui-même, retrouve en peu de temps son comportement habituel.
Cependant, la réorientation demanderait un certain laps de temps. N'a-t-on pas là la faiblesse de ce mode de défense ?
De l'attitude adoptée par le prédaté, qui excite, captive, modifie ses émanations par le stress et la ruse, il en résulte des caractéristiques précises qui définissent la situation d'arrêt :
- immobilité totale du chien,
- tonicité musculaire généralisée,
- rythme respiratoire modifié,
- style d'arrêt.


Pour COLOMB : " L'arrêt est un acte conscient, subordonné à un stimulus qui pousse le chien à
l'effectuer en toute connaissance de son action."
Il le définit avec plus de précision : " Le chien en arrêt est comme un soldat au garde-à-vous,
statique, tendu, rigide, obstiné au point de s'évanouir sous le soleil, le jour du défilé, mais l'un est
conscient d'être au garde-à-vous devant son supérieur hiérarchique, l'autre d'être en arrêt en présence du chasseur."
Selon ARKWIGHT : "Le chien en arrêt semble mâcher quelque chose ; il mâche le point ou
l'effluve."